Le rêve de François Coty

C’est au cours de la guerre de cent ans, qu’un premier château, une forteresse, fut édifié sur la hauteur (le Puy). Au fil des siècles et des restaurations successives, il se transforma en édifice hybride qui ne trouva pas grâce aux yeux de son nouveau propriétaire, François Coty, inventeur de la parfumerie moderne. Celui-ci le fit raser en 1912 pour faire édifier à la place un somptueux château dans le plus pur style du XVIIIème siècle, copie presque conforme du château de Champlâtreux dans le Val d’Oise. Coty, de son vrai nom Spoturno, a des exigences incroyables, il veut faire aussi bien que les constructeurs du grand siècle : l’empereur du parfum va concurrencer les rois de France.

La chapelle située à l’entrée du château devra être une copie exacte de celle de Versailles réduite au quart. Les installations sont grandioses : les lavabos sont en marbre et les plonges en cuivre, les sols de marbres polychromes, les boiseries sont sculptées dans la masse et les chapiteaux de colonnes décorés de feuilles de lierre, d’acanthe, de laurier… La cuisine est de marbre blanc, la pâtisserie de marbre rose et vert et la lingerie, sur deux étages, comporte 140 placards en bois de citronnier ou en ébène de Macassar incrustés de nacre… Les travaux commencèrent en 1912 pour s’achever en 1929. Mais François Coty y résida peu puisqu’il s’éteignit en 1934.

A sa mort, le château fut placé sous séquestre de ses nombreux créanciers. Pendant la deuxième guerre mondiale il fut successivement occupé par l’Etat Major du Ministère de la Marine, par les troupes allemandes jusqu’en 1942, et par une annexe de l’hôpital de Tours jusqu’en 1946. Christiane Coty, la fille du parfumeur en hérita en 1947.

La renaissance d’Artigny en 1961

En 1959, René Traversac, le fondateur des Grandes Etapes Françaises, ne possède encore qu’un établissement : le Prieuré près de Saumur. Mais il a pris goût à l’hôtellerie et cherche à en acquérir un deuxième. Le Château d’Artigny, dominant la vallée de l’Indre, avait justement été mis en vente par Christiane Coty. Il visita la majestueuse demeure et en apprécia la beauté, mais la perspective des travaux d’aménagement en hôtel modérèrent son enthousiasme. Après quelques semaines de réflexion, il prit finalement le risque d’acheter. Une formidable aventure commençait qui devait le mener, quelques années plus tard, à présider la chaîne naissante des “Châteaux-Hôtels de France” , puis à participer activement à sa fusion avec celle des “Relais de Campagne” pour que les “Relais et Châteaux” voient le jour en 1975.

Le Château d’Artigny reconverti en hôtel de luxe (grâce, entre autres, au talent du décorateur Pierre Scapula), ouvrit ses portes le 27 mars 1961.

La Rotonde, pièce maitresse du Château

La pièce maîtresse du château, est assurément la rotonde au premier étage. Cette salle de réception aux hautes fenêtres donnant sur la vallée de l’Indre et ouverte sur l’ancien bureau de François Coty est couronnée à 9,20 m de hauteur d’une coupole peinte d’une époustouflante fresque en trompe l’œil. Cette peinture (huile sur toile marouflée) hyperréaliste qui domine l’assistance est signée Charles Hoffbauer. Elle évoque un bal costumé au château. De nombreux amis et parents de François Coty y sont réunis, peints grandeur nature. François Coty avait fait la connaissance du peintre Charles Hoffbauer, spécialiste des fresques murales, aux Etats-Unis. Il lui confia la réalisation de son projet tant par reconnaissance pour son talent de peintre que par désir de lui donner un coup de pouce. De 1922 à 1924, Charles Hoffbauer travailla pendant 2 ans à la fresque.